Affrété par Decathlon, un train convoyant plus de 600 000 articles de sport est arrivé à la plate-forme Delta 3 ce lundi matin depuis Wuhan, en Chine centrale. L’enseigne nordiste, qui souhaite favoriser des modes de transport plus écologiques et économiques, envisage des liaisons régulières.
1.Un périple de 10 800 kilomètres
C’est à 11 h 30, sous une fine pluie d’automne et devant une assistance copieuse, que le convoi de 41 conteneurs parti de Wuhan le 28 octobre est arrivé sur le terminal de transport combiné de Delta 3. Un périple de 10 800 kilomètres à travers sept pays et deux continents. À l’intérieur, 630 000 articles (textiles saison hiver et matériel de fitness) destinés à l’entrepôt Decathlon. De là, ils seront ventilés vers les 10 entrepôts régionaux puis dans les 300 magasins de l’Hexagone. Le train, dit block, est composé des mêmes conteneurs, du départ à l’arrivée. D’habitude, les conteneurs acheminés par rail de Chine le sont à bord de trains partagés avec d’autres entreprises.
2.Pourquoi se connecter à la Chine ?
Decathlon possède de nombreux sites de production en Chine (tous les articles ont été fabriqués dans la région de Wuhan) et emploie 17 000 collaborateurs dans le pays. Le bénéfice du train est triple. Il est économique : « le délai par rapport à une voie maritime est divisé par deux », indique Christophe Dupas, responsable logistique. Par bateau et route, le même convoi aurait mis 41 jours, soit 20 de plus. En outre, « la disponibilité de nos articles et de nos produits est accélérée », souligne Christophe Dupas. Le gain est aussi écologique avec « 36 % de CO2 économisés par rapport au maritime et à la route ». Quant aux coûts, ils sont quasi-identiques : la liaison ferroviaire directe entre Wuhan et Dourges revient au même prix (non communiqué) qu’un transport combinant bateau et route.
3.Vers une liaison hebdomadaire ?
Pour Decathlon, ce convoi est un test. L’objectif est de mettre en place une liaison mensuelle à partir de début 2018, puis hebdomadaire à compter du premier semestre 2019. Si la quantité de marchandises convoyée par ce train paraît considérable, cela reste peu en rapport aux 110 millions d’articles qui transitent chaque année par cet entrepôt de 56 000 m2, l’un de ses quatre dits « continentaux ».
Mais Decathlon ambitionne d’intensifier son approvisionnement par rail. En 2018, l’entrepôt accueillera à la fois des trains partagés et des trains blocks à hauteur de 30 conteneurs par semaine. François Dewitte, directeur général de Décathlon France, a proposé ce lundi qu’« aucun produit vendu dans nos magasins n’ait fait l’objet d’un transport aérien courant 2018 ».
Effet «boule de neige»?
Décathlon a fait des émules. Dès lundi prochain, un deuxième train en ligne directe de Wuhan se présentera à Delta 3. Il est affrété par Gefco, pour le compte de Peugeot. Mais l’intensification des échanges suppose de pouvoir exporter vers la Chine. Pas d’inquiétude de ce côté-là. « Ils sont preneurs de produits agro-alimentaires, de pièces mécaniques », souligne Xavier Perrin.
« Un pas de géant vient d’être accompli »
Le directeur commercial de Delta 3 « espère un effet boule de neige, que de plus en plus d’exportateurs et d’importateurs se regroupent pour faire marcher le train ». « C’est le début d’une longue histoire », veut croire Didier Lebrun, directeur du terminal de transport combiné LDCT. « Un pas de géant vient d’être accompli », abonde Christophe Pilch, président de Delta 3.
La principale difficulté du transport tient aux écartements de rails qui ne sont pas les mêmes dans les ex-républiques soviétiques. « À la frontière sino-kazakhe, il a fallu transborder les conteneurs sur d’autres wagons et à nouveau les changer à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne », explique Xavier Perrin, directeur commercial de Delta 3. La société Damco s’est chargée des opérations d’affrètement, de synchronisation des opérations de transport aux frontières et de douane.
Pour la plateforme multimodale dourgeoise, cette nouvelle tombe à point nommé alors qu’une extension de 350 000 m2 d’entrepôts logistiques est en cours de réalisation, qui lui fera doubler sas capacités de stockage.
Un projet appuyé par la Chine
La liaison n’aurait sans doute jamais vu le jour si elle n’avait pas été encouragée au plus haut niveau par la Chine. Son gouvernement a lancé en 2016 un plan de 100 milliards de dollars baptisé « One road one belt », visant à établir de nouvelles routes commerciales avec l’Europe.
« Les autorités chinoises investissent sur des solutions techniques, elles ont modernisé leurs infrastructures pour exporter plus facilement, elles sont en soutien des entreprises privées qui mettent en place ce type d’initiatives » indique Bruno Thellier, responsable logistique Décathlon Chine. « Le Wuhan est une zone en développement très fort poussée par le gouvernement chinois ».